Texte:
Charles-Édouard Carrier
Photographies:
Charles-Etienne Pascal

 

La destination, c’était Portland et on y est arrivé. Mais à voir le bleu sur l’écran du GPS, l’océan Pacifique n’est vraiment pas loin. Samedi matin, notre groupe est confronté à un choix: aller manger gratuitement au dîner réservé aux VIP organisé par BMW Motorrad ou prendre la van et mettre le cap à l’ouest pour se remplir les yeux du Pacifique. The One ou les vagues de la côte Ouest?

Ce serait con de ne pas se rendre à la côte. Quand même…

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Alors on monte dans la GMC pour terminer officiellement la traversée de l’Amérique d’est en ouest. Il y a 128 km sur la route 26 qui nous séparent de la plage de Cannon Beach. Dès que l’on sort du centre de la ville de Portland, un épais brouillard nous enveloppe. On traverse les montagnes et s’engouffre dans une forêt de conifères. La chaussée rendue luisante par la pluie modérée s’étale devant nous en une longue succession de courbes serrées. La van dans les nuages, la visibilité est réduite. Il faut ralentir. C’est encore plus beau, plus vert, plus magique à cette vitesse-là. Tout bas, la douceur de Valtari de Sigur Rós est une musique parfaite pour éléver l’ambiance à un autre niveau.

On s’arrête sur le bord de la route pour un instant. En faisant glisser la lourde porte de la GMC, l’odeur est frappante. Le bois. L’odeur du bois. Un bois qui n’a pas d’équivalent. Pas celui de Tremblant, pas celui de l’Estrie, ni celui de l’Abitibi ou la Côte Nord. On inspire comme on lit une histoire. De longues phrases remplies d’émotions et de couleurs qui s’infiltrent et s’agrippent en dedans.

 

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Et puis une trentaine de minutes plus tard, le bout de la route, le cul-de-sac où ça se termine. Nous y sommes. Violent, grandiose et bruyant, le Pacifique s’agite devant nous. Tellement absorbé par le moment et la fierté d’avoir traversé le continent jusqu’à en sortir les roues avant du chemin qu’on en oublie de prendre une photo.

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Le petit village de Cannon Beach ne compte même pas 2000 habitants. La rue principale est marquée par une suite de cafés, d’hôtels et de surf shops construits en bois, parfois sur pilotis, à la saveur de Cap Hatteras. Cannon Beach, c’est ici que les lovers de Portland viennent passer des weekends vue sur la mer, souper à la chandelle, couché de soleil et beaucoup de temps dans la chambre. On s’arrête au Bill’s Tavern. La noire aux piments forts brassée sur place, la chaudrée de palourdes, les fish and chips et la pluie, toujours la pluie.

Cannon Beach, c’est ici que les lovers de Portland viennent passer des weekends vue sur la mer, souper à la chandelle, couché de soleil et beaucoup de temps dans la chambre.

On se rend à la plage. Les chiens jouent. Les oiseaux attendent que le temps passe. Par une température aussi peu clémente, il n’y a que quelques rares personnes qui se risquent à fouler les derniers mètres de terre ferme avant qu’elle ne se perde dans l’eau. La vraie route doit mener jusqu’à l’eau saline. La main dans le froid du Pacifique, nous sommes exactement à 4880 km de Montréal, on lève les yeux et à gauche, Haystack Rock, cet immense rocher de 72 mètres de haut qui nous regardent. Avec sa silhouette dans la brume, les pieds qui baignent dans le Pacifique, il est devenu la figure emblématique de l’endroit. Le sable de Cannon Beach et son Haystack Rock, c’était aussi celui du film les Goonies et Point Break.

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On fixe l’horizon un moment. On nage dans un océan de possible, chacun une chanson dans la tête.

C’est en tournant le dos au Pacifique que l’on réalise que nous sommes déjà sur le chemin du retour. Ce moment où l’on atteint le sommet, l’extrémité, le bout de la route, celui où l’on pivote sur nous-mêmes ou amorce la descente, il marque à la fois une fin et un début. Nous avons parcouru tout ce chemin, c’est la fin de cette route vers l’ouest, mais en regardant très loin vers l’est, on voit aussi le futur. Demain et l’an prochain. On voit des rêves et des amours, des histoires à construire et un monde à découvrir.

La fin d’une étape est le début d’une nouvelle. Et on ramène un peu de Pacifique avec nous.

 

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